On parle de lui comme du nouveau patchouli. Or noir des parfumeurs, le bois de oud a su trouver sa place auprès de nez initiés à sa senteur boisée et fumée si particulière. Si son origine remonte à la nuit des temps, la tendance d’intégrer du oud aux compositions est quant à elle plutôt récente. Mais qui se cache-t-il réellement derrière cet ingrédient rare et mystérieux ?
L’histoire d’un bois mystique
Réaction parfumée
Le bois de oud désigne en réalité une résine très odorante, produite par certains types d’arbres de l’espèce aquilaria, poussant dans les forêts tropicales d’Asie. Connu sous divers noms comme le bois d’Agar, le bois d’aloès ou encore le bois d’argile, l’oud (son nom arabe) est secrété par l’arbre lorsque celui-ci se fait attaquer par un champignon répondant au doux nom de Phialophora parasitica. Quand l’arbre est sain, il ne dégage aucune odeur. C’est donc de la réaction du bois malade que provient la résine tant convoitée. Drôle d’origine pour un ingrédient parfumé ! Pas aussi surprenant que la provenance de l’ambre gris dont l’origine vous étonnera si vous ne la connaissez pas…
Parfum d’Orient
Pour revenir à notre bois précieux, cette résine très parfumée est utilisée depuis des millénaires à des fins thérapeutiques, esthétiques mais aussi spirituelles. L’oud est présent dans les Veda indiens, certains des textes les plus anciens de l’humanité, mais aussi dans la Bible. Les bouddhistes brûlent ses copeaux pour entrer en méditation quand la médecine traditionnelle asiatique le recommande pour traiter maux de ventre et autres affections respiratoires. Dans la culture musulmane, l’oud apparaît comme l’un des ingrédients fondamentaux de la parfumerie. Et encore aujourd’hui, son odeur se diffuse dans tout le Moyen-Orient. Son essence parfume l’eau du bain, ses copeaux sont brûlés dans le bakhour (encens naturel composé de plusieurs éléments odorants) pour imprégner les vêtements et la chevelure. Son huile essentielle s’intègre aussi aux mukhallat, ces compositions parfumées sans alcool, que portent hommes et femmes au quotidien.
Une essence rare
C’est cette précieuse résine qui est récupérée puis traitée pour être intégrée dans les parfums. Alors que l’espèce aquilaria comptabilise une vingtaine d’arbres, seules deux ou trois variétés d’entre elles peuvent produire de l’oud. Une fois infecté, il faut attendre environ 6 mois pour que l’arbre sécrète son remède parfumé. Seul un arbre sur cent produit de l’oud, mais comme il est impossible de savoir lequel, il est nécessaire d’en abattre beaucoup avant de tomber sur la résine recherchée.
Si ces arbres poussaient en nombre il y a encore quelques années dans les forêts d’Asie du sud-est, ils ont été rapidement décimés. Aujourd’hui, ces arbres sont protégés dans de nombreux pays, faisant de l’oud un produit encore plus rare. Mais pour répondre à une demande de plus en plus croissante, on cultive ces essences. Et c’est de la main de l’homme que naîtra l’oud, en inoculant directement le champignon à l’arbre.
Oud & parfum
Mais ça sent quoi l’oud ?
Une fois distillé, le bois de oud délivre une essence à l’odeur envoûtante. Le succès de de cette matière est dû à son parfum mystérieux et à ses facettes complexes. Il revêt des notes boisées, résineuses et ambrées qui rappellent le santal, avec un “quelque chose” supplémentaire qu’il est difficile à définir. Cette essence dévoile aussi un côté plus sombre et animal, presque sexuel, brut. Il apporte beaucoup de chaleur orientale à une composition et dévoile un sillage à l’odeur fauve et aux nuances d’encens, très sensuel. Avec l’oud, une fragrance se parera de beaux reflets ambrés, comme une invitation à voyager…
Oud véritable ou mirage olfactif ?
À cause de sa rareté, l’essence de bois de oud est devenue un ingrédient qu’il est presque impossible de se procurer. Pour acheter de l’essence véritable, il faut travailler directement avec des paysans Laotiens ou Birmans et surtout avoir les moyens d’acquérir cet or noir. Parfois plus cher que l’or, son prix oscille selon les variétés entre 15 000€ et 60 000€… le litre ! Le coût de la matière est tellement élevé que son essence est majoritairement reproduite en laboratoire. Si vous achetez un parfum composé d’oud, il y a donc de fortes chances pour que celui-ci n’en contienne pas un seul goutte !
Pour le recréer, les parfumeurs combinent plusieurs molécules de synthèse aux odeurs boisées et ambrées avec d’autres huiles essentielles naturelles. Pour reproduire le parfum de l’oud, on peut ainsi utiliser du patchouli, du vétiver, de l’encens et du cypriol, une plante dont l’essence délivre une senteur boisée et fumée très aromatique. Sans la synthèse, le prix d’un parfum composé d’essence de bois de oud serait inabordable !
L’utilisation du bois de oud en parfumerie
Cet ingrédient est difficile à manier tant ses nuances sont complexes et puissantes. Sa senteur est si tenace qu’elle a la particularité de traverser la fragrance. Présente de la note de tête jusqu’à la note de fond, elle finit par délivrer un sillage très sensuel. Pour lui amener de la subtilité, les parfumeurs peuvent y ajouter des notes plus fraîches et hespéridées avec de la mandarine ou de la bergamote, mais aussi des nuances florales pour apporter davantage de féminité. Pour renforcer au contraire son aspect brut, le nez peut accorder l’oud à des notes cuirées ou animales, dans l’esprit d’un jus corsé.
Afin de s’adapter au marché occidental, certains disent que l’oud a perdu de sa puissance afin de s’assagir, à l’image du musc qui serait devenu plus « propre » au fil des années. Mais cette facette de plus en plus prisée pourrait bien rentrer au panthéon des notes emblématiques de la parfumerie moderne d’ici quelques décennies. L’auteur Denyse Beaulieu parle même d’un nouveau genre « le french oriental » dont l’oud serait l’ingrédient star. Affaire à suivre !
Connaissiez-vous l’oud, cet ingrédient parfumé mystérieux ?
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